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Dans la dernière Revue d'économie financière, une analyse critique des inégalités de genre dans le secteur financier et en gouvernance d’entreprise

Dans la dernière Revue d'économie financière, une analyse critique des inégalités de genre dans le secteur financier et en gouvernance d’entreprise
Publié le 09/04/2025 à 12:00

CRITIQUE LITTERAIRE. Cette REF n°157, intitulée Femmes et Finance, attitudes, préférences et stéréotypes, conçue sous la direction de Marie-Hélène Broihanne, Gunther Capelle-Blancard et Antoine Rébérioux, met en exergue que malgré des progrès, la part des femmes dirigeantes dans les secteurs de la banque et de la finance reste globalement faible. Elle se heurte encore à des barrières internes et externes fortes, influencées notamment par les marchés financiers. 

Alors qu’un journaliste quelque peu malicieux, lui demandait ce que cela faisait de vivre à côté d’un génie, Marie Curie lui répondit imperturbable : « Demandez-le donc à mon mari ! »

Ce trait d’humour illustre bien le terrain semé d’embuches pour les femmes dans leur juste reconnaissance, historiquement, dans les domaines scientifiques, mais tout autant aujourd’hui pour le secteur financier : « Dans toutes les figures empreintes de clichés, façonnant l’imaginaire collectif, il y a une constance : les hommes sont omniprésents… ». Singulièrement, les compétences de l’idéal-type de « l’acteur financier » sont pratiquement aux antipodes des attitudes, préférences et valeurs typiquement prêtées aux femmes dans nos sociétés.

Aussi, le grand mérite du nouveau collectif de la REF (revue d’économie financière) est de proposer un point sur ce sujet de littérature « Femmes et Finance », en approchant cette thématique le plus largement possible dans ses champs d’investigations envisageables : le secteur bancaire, les marchés financiers, les institutions de régulation, la gouvernance d’entreprise, le monde académique, etc.

Le déséquilibre se résorbe trop peu et trop lentement

Ce numéro, sous la direction de Marie-Hélène Broihanne*, Gunther Capelle-Blancard** et Antoine Rébérioux***, propose une analyse critique des inégalités de genre dans le secteur financier et en gouvernance d’entreprise. Après une introduction lumineuse de Christine Lagarde où cette dernière expose, d’expérience, les enjeux d’accès au salaire et au pouvoir décisionnel, les contributions, très complémentaires et particulièrement documentées, des prestigieux co-auteurs mettent en lumière les questions d’équité de genre en finance et « dépassant la simple quête de gains de performance pour renforcer l’inclusivité et la diversité ». Si les inégalités de genre restent « patentes, durables et choquantes », les progrès en la matière n’en sont que plus remarquables. Par exemple, la majorité des banquiers sont des banquières !

Mais la part des femmes dirigeantes reste globalement faible. Celle des femmes en finance se heurte encore à des barrières internes et externes fortes, influencées par les marchés financiers. Désormais la loi impose la mixité dans les conseils d’administration et vient en renfort pour permettre de briser ce terrible « plafond de verre » qui fait que, encore à ce jour, aucune femme ne dirige un grand établissement bancaire… même si du côté des banques centrales, la présence féminine a connu un effet de rattrapage notoire au cours de la dernière décennie.

Si le combat vers cet objectif d’équité reste rude, de nombreuses opportunités émergent, appelant des réformes éducatives, institutionnelles et culturelles, pour promouvoir une véritable égalité des chances. Il reste que la réflexion doit se poursuivre sur les politiques de « quotas » afin que, in fine, cette mesure destinée à promouvoir l’égalité n’aboutisse pas à des « formes indirectes de désavantages ». Comme le rappelle Christine Lagarde : « Les femmes ont leur place partout où les décisions se prennent. Elles ne devraient pas être l’exception. » Il reste que ces mesures, pour donner leur plein effet, devront être accompagnées d’une prise de conscience partagée par les hommes « sur leurs responsabilités domestiques » afin d’insuffler davantage de confiance aux jeunes filles.

Combattre les discriminations, promouvoir une véritable égalité des chances, le chemin est tracé, mais il nécessite, pour une parfaite réussite d’être accompagné d’une profonde révolution des mentalités. Une parution, dense, dépassionnée, qui éclaire brillamment l’avenir du sujet, pour tous publics.

Jean-Louis Chambon
Président-fondateur du Cercle Turgot

* Marie-Hélène Broihanne, professeur des universités, Strasbourg.
** Gunther Capelle-Blancard, professeur des universités, Paris 1.
*** Antoine Rébérioux, professeur des universités, Paris Cité.


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