Depuis le 13 avril, près de 13 attaques coordonnées et violentes ont visé des établissements pénitentiaires
partout en France, suscitant une vague d’indignation. Parmi ces voix qui s’élèvent,
celles des magistrats et particulièrement des procureurs, qui tiennent à
rappeler que viser l’administration pénitentiaire, c’est viser la justice et l’Etat
de droit. Une enquête a par ailleurs été ouverte par le Parquet national antiterroriste.
« S’attaquer
à l’administration pénitentiaire, c’est s’attaquer à la justice dans son
ensemble », dénonce la Conférence nationale des procureurs de la
République (CNPR), dans un communiqué diffusé jeudi 17 avril dans la soirée. L’instance
« exprime sa totale solidarité avec l’ensemble des agents de l’administration
pénitentiaire face aux actes intolérables commis ces derniers jours à l’encontre
de certains d’entre eux et au préjudice des bâtiments pénitentiaires ».
Depuis dimanche 13
avril en effet, plus d’une dizaine d’attaques visant l’administration
pénitentiaire ont eu lieu à travers la France, visant à la fois des
établissements pénitentiaires dont l’ENAP, des véhicules ou même des domiciles
de surveillants, ciblés par des départs d’incendies volontaires. Les procureurs
de la CNPR « condamnent ces actes avec fermeté », et « rappellent
que les agents pénitentiaires travaillent au quotidien à la sécurité de nos
concitoyens, dans des conditions souvent très difficiles, en assurant la prise
en charge et la surveillance des personnes sous main de justice en application
des lois de la République. A ce titre, toute forme de violence, menace ou acte
d’intimidation les visant constitue une atteinte grave à nos valeurs ».
« Une
solidarité institutionnelle »
« L’expression
de cette solidarité institutionnelle s'explique par le fait que, dans un Etat
de droit, la mission de l’administration pénitentiaire, prise dans toutes ses
composantes, résulte des décisions prises par les magistrats », tient
à préciser en complément Eric Maurel, procureur général de Basse-Terre, via son
compte X.
« Le premier
président et le procureur général de la cour d’appel de Basse-Terre expriment
leur plus vive émotion et tout leur soutien aux personnels de l’administration pénitentiaire
victimes d'attaques intolérables », exprime-t-il aussi dans cette
publication.
Cette solidarité des
magistrats envers les agents pénitentiaires se trouve également du côté du syndicat
Unité magistrats SNM FO, dont les membres ont tenu à « exprimer [leur] plus
profond soutien et [leur]solidarité à l’égard de l'ensemble du personnel
pénitentiaire touché par ces actes d'une extrême violence ». Dans un texte
publié sur son site internet, le syndicat qualifie
à son tour ces attaques « d’une atteinte directe aux valeurs de notre République et
à ceux qui œuvrent au service de la justice et de la sécurité publique »,
soulignant lui aussi « les conditions déjà particulièrement difficiles »
dans lesquelles exercent les agents pénitentiaires.
Des agents qui, malgré
tout, « continuent d'assurer leurs missions avec un sens aigu du devoir »,
saluent les magistrats. Le syndicat Unité demande de surcroît une protection « renforcée »
des établissements pénitentiaires et de leur personnel, et insiste sur la
nécessité de « mener une enquête rapide permettant l'identification et
l'interpellation des auteurs de ces actes criminels » qui menacent « notre
Etat de droit ».
Le procureur
antiterroriste réaffirme son « plein soutien à l’administration
pénitentiaire »
Car c’est bien le
fonctionnement de la justice qui semble être visé par ces attaques coordonnées.
D’après les premiers éléments diffusés dans la presse cette semaine, les faits
sont orchestrés depuis la messagerie Telegram et signés de l’acronyme « DDPF »,
pour « Droit des prisonniers français ». Les auteurs ont, de leur
propre fait, diffusé des vidéos des attaques sur les réseaux sociaux.
Mardi 15
avril, le Parquet national antiterroriste annonçait l’ouverture d’une enquête
pour « association de malfaiteurs terroristes en vue de la préparation
d'un ou plusieurs crimes d'atteinte à la personne » et « dégradation
ou détérioration en bande organisée du bien d'autrui » pour les neuf
établissements ciblés. A Toulon, l'enquête a pour chef « une tentative
d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste commise sur une
personne dépositaire de l'autorité publique », précise le parquet.
Dans une publication
LinkedIn, Olivier Christen, procureur de la République antiterroriste, a réaffirmé
ce vendredi au nom de son parquet son « plein soutien à l’administration
pénitentiaire, à ses 45 000 agents et à leur famille ». Le magistrat a
aussi décrit les investigations comme « complexes », « qui
imposent comme toujours au respect de la stricte confidentialité des enquêtes ».
Interrogé par FranceInfo, Olivier Christen ne semble pas céder à la surenchère
politique et à ceux qui exigent des résultats immédiats ; il a tenu, lors
de cet entretien, à rappeler « le cadre d’intervention du PNAT, les
qualifications retenues à ce stade et la mobilisation, sous coordination de la sous-direction
antiterroriste, des services nationaux et territoriaux de la police judiciaire
pour identifier les auteurs des faits, leurs coordonnateurs et les
commanditaires ».
Mylène Hassany